« Nous combattons des animaux et nous allons les traiter comme tels » ! C’est par ces termes choisis que le ministre de la défense israélien Yoav Gallant a justifié le blocus complet de la bande de Gaza. Effrayant… Une chronique en mémoire d’un homme Humain.
Ils s’appellent Mendel, Leonid, Dov, Line, Piotr, Gédal, et encore Pavel, Sissl, Jozek, Bella, Isidor… Ils sont juifs de Russie, de Pologne, d’Ukraine, de Géorgie. Le plus jeune a 17 ans, et n’a jamais connu de femme. Le plus âgé a les cheveux blancs, le visage carré et les traits fatigués. Autrefois, ils étaient comptable, horloger, paysan, chanteur, boucher égorgeur ou faussaire. Maintenant, ils sont partisans.
Nous sommes en 1943, et ce groupe hétéroclite entreprend de traverser l’Europe d’est en ouest, depuis le front russe, jusqu’à l’Italie, avec un rêve chevillé au corps : S’embarquer pour la Palestine, y cultiver la terre, et planter des oliviers et des orangers dans le désert. En attendant, leur quotidien est fait de marches harassantes, d’espionnage des communications ennemies, d’actes de sabotage des infrastructures nazies, et, parfois, de confrontations armées.
En chemin, ils perdent tragiquement certains des leurs, mais leur groupe s’enrichit aussi de la rencontre d’autres vies errantes, rescapés de l’horreur, témoins de l’histoire. Une fois, ils attaquent à la grenade un « Lager » presque abandonné, délivrant au passage quelques survivants silencieux, hébétés. Une autre fois, ils découvrent une prison emplie de cadavres russes et polonais squelettiques, font la connaissance de Schmulek, qui vit au fond d’un puits depuis deux ans, ou pénètrent dans un sous-sol où des soldats de la Wehrmacht se traînent au sol, le dos balafré : Les Sibériens ne tuent pas les Allemands, ils se « contentent » de leur trancher la moelle épinière…
Pris dans la débâcle de l’armée allemande à l’est, au milieu de terres dévastées par la guerre, de populations épuisées et désespérées, le groupe maintient le cap vers l’ouest, vers un nouvel horizon de vie. Mais l’essentiel est ailleurs.
Lorsque Gédal sort son violon, le soir près du feu, Pavel, aux reins de bison, entonne O Sole Mio de sa voix de stentor. Tout le monde rit. Mais quand Bella éclate en pleurs en tentant de chanter une romance, Gédal lui tient doucement la main et l’emmène à l’écart. La nuit, des couples se forment, des corps s’étreignent dans un élan de vie. La journée, chacun est à sa tâche, sans haine, ni esprit de vengeance envers l’ennemi. Seuls l’espoir, l’entraide, la dignité unissent ces hommes et femmes, au-delà de leurs différences, par-delà leurs souffrances.
« Maintenant ou jamais » : Dans ce roman publié en 1982, Primo Levi, le célèbre auteur de « Si c’est un Homme » et survivant de la Shoah, nous rappelle avec force et pudeur, que le seul rempart face à la barbarie est notre humanité commune, celle que nous nous reconnaissons et celle que nous ne nions pas à autrui.
Différent des autres chroniques! Cela jette un de fraîcheur! On pourrait ajouter que reconnaitre l’humanité d’autrui, c’est d’une part voir chez l’autre le reflet de ses propres rêves et peurs, et d’autre part justifier la haine et l’amour de « l’ennemi ». Humaniser l’autre c’est en quelque sorte lui donner raison. Et cela demande beaucoup, beaucoup de courage, surtout si un fils ou mère ont fait les frais de cette colère.
Différente des autres chroniques! Cela jette un peu de fraîcheur! On pourrait ajouter que reconnaitre l’humanité d’autrui, c’est d’une part voir chez l’autre le reflet de ses propres rêves et peurs, et d’autre part justifier la haine et l’amour de « l’ennemi ». Humaniser l’autre c’est en quelque sorte lui donner raison. Et cela demande beaucoup, beaucoup de courage, surtout si un fils ou mère ont fait les frais de cette colère.
Merci pour ce commentaire. La philosophie peut être vue comme une matière académique assez technique, et c’est très bien, mais elle peut aussi nous aider à prendre de la hauteur sur les évènements. C’est ce que j’ai essayé de faire dans cette chronique. Et oui, il faut beaucoup de courage pour dire à l’autre : Tu as tué mon fils ou ma mère, mais tu es mon semblable. Je te tends la main parce que nous avons tous beaucoup trop souffert et parce qu’il n’y a pas d’autre issue à notre drame commun.