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C’est un palais destiné à fendre l’air, pas un vulgaire tapis volant. Un Boeing 747 aménagé luxueusement, payé généreusement par la population qatari, offert en toute simplicité au bon président Trump. Que d’amabilité ! Quel geste élégant et accepté comme tel ! À voir…

Le cadeau est un acte social complexe, impliquant deux parties, le donateur et le destinataire. Au commencement de l’acte d’offrir, il y a l’intention du donateur, mais rien n’est plus faux que l’adage selon lequel « seule l’intention compte » ! En réalité, plus que par l’intention, le cadeau s’apprécie par sa finalité. Dissimulée dans le contexte, le contenu du cadeau et son symbole, la finalité est la raison d’être du cadeau, et son mystère. Démêlons tout cela.

Ordinairement, un cadeau est offert avec l’intention de procurer du plaisir à son destinataire. Il arrive qu’un cadeau soit reçu avec une moue boudeuse, mais il s’agit alors d’un ratage. Qu’il s’agisse d’une boîte de chocolat offerte au concierge de votre immeuble, ou d’un bouquet de fleurs à l’adresse de l’hôtesse d’une soirée, l’intention est la même : faire plaisir. Mais derrière l’intention, se cache parfois une finalité, plus ou moins ostensible, voire avouable.

Alors que l’intention est l’effet immédiat recherché par le cadeau et concerne le destinataire uniquement, sa finalité constitue un objectif plus lointain, et se rapporte à la relation entre donateur et destinataire ou au donateur lui-même. Il existe ainsi au moins trois catégories de cadeaux, en fonction du type de finalité recherchée.

Le cadeau gratuit est celui pour lequel l’intention et la finalité coïncident et visent le seul plaisir du destinataire. Le vélo rouge offert à votre enfant qui en rêve, est typiquement un tel cadeau. Selon l’anthropologue Robert Lowie, ce genre de cadeau n’existe qu’entre proches, car un principe tacite régit toute autre forme de cadeau : La réciprocité.

La règle du cadeau

Cette réciprocité est de mise concernant le cadeau « avantageux », dont la finalité est d’initier ou maintenir une relation harmonieuse avec le destinataire. L’orchidée blanche choisie pour une belle-mère acerbe, est un cadeau avantageux, dont on attend un certain retour sous forme d’un rapport apaisé avec la personne concernée.

Enfin, le cadeau « égoïste » est celui dont la finalité est de servir essentiellement les intérêts du donateur, au-delà du plaisir suscité chez le destinataire. Le livre de recettes que le mari offre à sa femme afin qu’elle améliore ses préparations culinaires, est un cadeau purement égoïste destiné à bénéficier principalement au donateur.

Alors qu’en est-il du Boeing 747 offert par le Qatar à Donald Trump, ce gros joujou hors de prix qui va droit au cœur d’un président narcissique et peu regardant ? Un cadeau désintéressé pour un vieil homme infantile et capricieux ? Quelle fable ! Le roi du Qatar a certainement sa petite idée sur sa finalité… Mais Trump n’en a cure : Un cadeau est un cadeau, non ? Ça vaut cher cet engin, et c’est quoi cette histoire de réciprocité ?

Isabelle Schönbächler

Isabelle Schönbächler est diplômée en Physique et Philosophie. Dans ses chroniques, elle mêle actualité et concepts philosophiques.

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