Après l’ouverture en fanfare de la période olympique, place aux compétitions sportives, et à leur lot d’émotions, de victoires, de défaites, de vainqueurs et de vaincus. Les jeux olympiques sont une parenthèse bienvenue, mais sont-ils vraiment des jeux ? À voir…
Petite question métaphysique : Qu’est-ce qui fait qu’un jeu est un jeu ? La marelle est un jeu, la belote, le Monopoly, le ping-pong, la chandelle, le bowling, la balle au prisonnier, sont des jeux. Certains sports tels que le tennis, le football, le golf, le beach-volley, ou le water-polo sont aussi des jeux. Mais il est également possible de jouer à la poupée, au yoyo, à la dînette, au Rubik’s cube, ou aux Lego.
Certains jeux sont solitaires, d’autres se jouent à deux ou en équipes. Il y a parfois un gagnant et un perdant, mais jamais dans les jeux individuels. Certains jeux, tels les jeux de cartes, obéissent à des règles strictes, d’autres tels le trempoline ou la poupée, se pratiquent librement. Les jeux sont parfois une source de grande détente, mais ils font aussi souvent appel à une concentration et un sérieux intenses. Bref, on peut se demander s’il existe un dénominateur commun à l’ensemble des jeux. Autrement dit, les jeux sont-ils définissables ?
Le philosophe Ludwig Wittgenstein s’est intéressé indirectement à la question des jeux dans son essai « Investigations philosophiques » daté de 1953. Qu’en dit-il ?
« Qu’est-ce qui est commun à tous les jeux ? Ne dites pas : « Il doit y avoir quelque chose de commun, sinon on ne les appellerait pas “jeux” », mais regardez et voyez s’il y a quelque chose de commun à tous. Car si vous les regardez, vous ne verrez pas quelque chose de commun à tous, mais […] un réseau compliqué de similitudes qui se chevauchent et se croisent. »
Et Wittgenstein d’ajouter que les jeux forment plutôt une famille qu’un ensemble homogène, une famille dont les membres partagent, non pas un point commun, mais un « air de famille ». Cet air de famille prend la forme de recoupements entre groupes de jeux. Par exemple, trois jeux A, B, C forment un groupe de jeux ayant des règles, et ce groupe possède une intersection (C) avec le groupe de jeux C, D, E qui se jouent à deux.
Le jeu, un espace protégé de développement
Tout cela est très bien, mais comment savoir alors qu’un jeu est un jeu ? Le jeu est une activité, et elle possède une singularité que Wittgenstein a sans doute ignorée. Jouer nous concerne tous, mais en premier lieu les enfants. Pourquoi ? Parce que le jeu est une activité visant spécifiquement le développement de capacités physiques, cognitives, sociales, émotionnelles, dans un cadre protecteur et divertissant. Le jeu est l’expérience de la vie dans toute sa complexité, mais sans les enjeux et les risques inhérents à la vie « en vrai ».
Alors les jeux olympiques sont-ils des jeux ? Plus vraiment. En tant que tels, certains sports sont des jeux, mais pratiqués à un niveau professionnel, soumis à des enjeux financiers, géopolitiques et sociaux immenses, ils appartiennent à la vraie vie et non pas à son innocent plagiat.